F0RET ET TRANSFORMATION DU BOIS entre 1955 et 2005 : entre science fiction et réalité

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Etude de l’Observatoire du métier de la scierie

 

 

            Il ne s’agit nullement de parler de science fiction adaptée au bois et à sa transformation mais tout simplement de comparer ce qu’un visionnaire américain[1] entrevoyait en 1955 comme évolution[2] dans les cinquante années à venir. Loin d’être anecdotique, cette analyse prospective montre en tout cas la pertinence des évolutions entrevues même si certaines paraissent aujourd’hui farfelues (comme l’arrachage des arbres par hélicoptère), d’autres comme le traitement des arbres sur le parc à grumes, la détection des défauts par rayons x, ou encore la préfabrication des constructions et l’amélioration des qualités du bois par traitement sont devenues réalité. Reste que les rayons surchauffés, nommés lasers dans les années 60, et qui devaient « reléguer  la lame de scie à la ferraille » n’ont pas réussis à remplacer la traditionnelle lame de scie.

 

                                                     Sylviculture et foresterie des progrès fulgurants

             En 1955, en Amérique, on se préoccupait déjà  d’équilibrer la croissance de la forêt avec les prélèvements. On sortait à peine des 350 dernières années d’un prélèvement intense, quand les premiers colons se mirent à défricher pour planter du maïs. Un tiers seulement de ce bois a été utilisé pour les besoins de l’homme (charpente, traverse de chemin de fer), le reste détruit par le feu, les insectes et les maladies. Pour équilibrer croissance et prélèvements, l’auteur imagine qu’en 2005 « des forêts entières verront passer les saisons où se déchaînent les incendies de forêt sans subir de pertes importantes. La localisation des incendies par radar, l’utilisation de la télévision par les vigies forestières, l’emploi des hélicoptères pour accéder rapidement aux lieux d’incendie et l’extinction des feux par des moyens chimiques arrêteront net le plus grand ennemi des forêts ». Prédiction en partie vraie puisque maîtrisée aujourd’hui comme par exemple dans le massif landais où la lutte contre le feu est une priorité avec ses quadrillage coupe feu, ses tours de guêt, ses pompiers en alerte permanente dans les périodes à risque...

Machine à scier les arbres en usage en Caroline du nord

Novembre 1948

Qui préfigurera la machine à abattre

 

 
            De plus, l’auteur pense que « la science fera diminuer les maladies du bois ». Les forêts seront mieux exploitées et surtout  « le sol recevra des engrais et sera préparé pour une nouvelle plantation ». Avec l’aide de la génétique, les arbres de 2005 devraient être plus forts et plus vivaces et « les ouragans les plus furieux ne ravageront plus les forêts ». Une théorie que la tempête de 1999 a balayé au sens propre comme au sens figuré ! L’auteur pense que la croissance sera considérablement  accélérée par l’épandage d’engrais et une meilleure exploitation forestière mais, ce qu’il ne sait pas  c’est qu’elle sera plutôt   du fait des émissions excessives de  CO2 , résultats des activités humaines, à partir des années 1990.

 

 

 

 

           

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

            Récolte et 1ère transformation du bois, une vision futuriste mais pas tant que cela !

            En 1955, on envisageait l’arrachage des arbres par hélicoptère, après avoir fait subir aux racines un traitement de rétractation. Projet farfelu mais tout de même repris en matière de débardage de coupes inaccessibles. Une pratique lancée dans les années 1980 sur le massif alpin mais restée depuis marginale à cause des coûts exorbitants d’exploitation liés en partie au carburant.

Dans la scierie « un arbre entier transporté par des machines commandées à distance est amené des lieux de stockage jusqu’à l’usine ». L’auteur imagine « une machine où des brosses et un aspirateur le débarrassent de toutes ses aiguilles, le laissant nu comme un poulet déplumé » avant d’entrer dans la machine à écorcer  puis à couper en tronçons.  

 

            La suite : les branches sont utilisées pour l’extraction de la résine et de la cellulose. L’écorce tombe sur un tapis roulant qui l’emporte vers l’atelier où l’on fabrique les engrais.

            Dans le hall de sciage « le scieur, haut perché dans sa cabine de contrôle, va avoir à travailler sur une bille en étant aidé par les moyens scientifiques les plus récents. Grâce à la télévision, il inspecte la partie extrême de la bille et les rayons x lui permettront d’en examiner l’intérieur ». Le diagnostic terminé, le scieur est prêt pour le découpage qui « se fera à l’aide de rayons surchauffés d’une grande puissance. Les lames de scie du 20ème siècle ont depuis longtemps déjà été jetées à la ferraille.  Il n’y a pas de perte au sciage ».

            La suite des opérations de sciage « les pièces de bois sont aplanies et lissées comme des miroirs. Les planches ont une teinte marron qui est particulièrement appréciée. Un forestier muni d’un injecteur a, il y a quelque temps, teinté l’arbre dans la forêt ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

            Après le sciage, la préfabrication s’imposera   

            Il n’existe plus de système à sécher le bois. En effet, « les arbres sont séchés dans le bois avant même que les câbles de l’hélicoptère ne viennent les en tirer ». Ensuite  pour l’utilisation  des produits bois, l’auteur entrevoit que « la préfabrication sera une donnée fondamentale de la presque totalité des constructions du siècle prochain ». Sur le thème de l’augmentation des propriétés du bois « des moyens de compression donnera une dureté qui augmentera à la fois résistance aux efforts et à l’usure ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

           

           

             En 2008 que reste-t-il ?

            De cet ensemble de points visionnaires, on peut retenir que l’idée qui prévaut d’un prélèvement et   d’un usinage ultra moderne, il reste en exploitation forestière et dans les scieries les plus modernes un système de production assez proche. A savoir la prise en charge des grumes dans un processus de transformation piloté par des ouvriers postés devant des ordinateurs et surveillant des machines où les scies sont encore présentes pour débiter le bois. Le laser, qu’on nommait à l’époque rayons surchauffés,  n’a pas encore trouvé son emploi dans le débit du bois rond mais très largement employé pour la découpe du métal ! Les rayons x sont remplacés part des systèmes profilométriques, type scanner capables de « lire » conformité et aspect de surface afin d’assister l’opérateur et de décider même à sa place pour le pilotage d’un outil de production (déligneuse par exemple). Mais l’idée de « voir l’intérieur du bois » fait son chemin.       Ce sera certainement l’outil de demain en matière de classement du bois et de caractérisation mécanique incontestable de la matière bois.   

            L’utilisation du bois sous toutes ses formes (massif, reconstitué) dans la préfabrication est plus que jamais d’actualité. La filière sèche aujourd’hui valorise la fabrication des agencements de  l’habitat mais aussi des fermes industrielles en atelier qui consomment à elles seules plus de un million de m3 de sciage (malheureusement essentiellement importés d’Allemagne et des pays nordiques), ainsi que le taillage des charpentes avec les centres de taille à commandes numériques (quelques centres de taille dans les années 1990 à quelque 200 aujourd’hui en France, plus de 600 en Allemagne). Même évolution avec la fabrication des maisons à ossature bois dont le leader français Ossabois à Saint Julien-la-Vêtre dans la Loire en produit sur ses chaînes plus de 400 unités par an. Le traitement du bois a lui aussi fait son chemin avec le chauffage à haute température et les nouveaux apprêts (peinture, lasure) et les nouveaux produits d’imprégnation plus écologiques, à base d’huile végétale, qui augmentent la durabilité des produits mis en œuvre. Maurice Chalayer

 

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[1] L.J.CARR : Président de la société de recherches sur les produits forestiers et Président de la western line, association liée à l’industrie du bois

[2] Article « Regardez dans la boule de cristal ce que sera la sylviculture en l’an 2005 » paru en 1955 dans le n°114 de « Mécanique populaire »