1er Congrès national du club
des scieurs développeurs
et de leurs partenaires à Cublize
Face à un tournant économique délicat,
la scierie française doit
changer son image pour conquérir de nouveaux clients et
surtout attirer les jeunes vers le métier
Cristalliser des expériences, le rôle
de l’Observatoire du métier de la scierie
C’est le samedi 28 août, sur les rives du Lac des Sapins
à Ronno dans le Beaujolais, que s’est ouvert le premier
Congrès national du club des scieurs développeurs et de
leurs partenaires. Quelque cinquante congressistes venus des Vosges,
du Jura, de la Saône et Loire, de la Savoie, de l’Isère,
du Tarn, de la Drôme, de l’Ain, de la Loire, du Rhône
et accompagnés pour six d’entre eux de leur épouse,
ont "planché" toute la journée sur le thème
central : "Quel avenir pour la scierie française ?",
autour de huit ateliers organisés.
Organisée par l’Observatoire du métier de la scierie,
mêlant débats d’idées et convivialité,
cette rencontre a permis d’échanger et surtout de croiser
le vécu des scieurs et de leurs partenaires : propriétaires
forestiers, exploitants, fabricants de matériels, commerciaux,
formateurs, consultants, médecin du travail, représentant
de la Cram, fabricant de maison bois, négociants, élus…
Pierre Lambert, professeur de sciences économiques et sociales
et animateur de cette réunion, était là pour jouer
les candides et « faire parler les gens du bois » …
Lors de son discours d’ouverture, le président fondateur
de l’Observatoire du métier de la scierie, Maurice Chalayer,
a rappelé que l’Observatoire, lancé en 2003, est
un espace de discussion et non un syndicat professionnel comme certains
auraient pu le croire. L’objectif est de cristalliser des expériences,
croiser des points de vue, écouter les préoccupations
de chacun et faire remonter des problèmes partagés par
le collectif, comme par exemple celui de la formation au métier
scierie en déclin.
Le président a conclu son intervention sur des mots imagés
« Notre observatoire indépendant, lieu d’expertise
et de concertation sociale, met en avant l’idée que nous
devons "repenser le métier" en partant des hommes et
de leurs problématiques pour faciliter la reconnaissance des
scieries sur leur territoire auprès des partenaires que sont
les fournisseurs, les financeurs, les élus, les administrations
et les développeurs territoriaux… Suivre l’évolution
du métier de la première transformation du bois reste
l’angle d’attaque qui active ce premier congrès.
Et on connaît tous l’importance du bon choix de cet angle
en matière d’optimisation du sciage ! Nous devons être
ce maillon qui manque en France et qui permet de donner un éclairage
distancié sur une profession : la scierie. Médias, consultants,
développeurs de la filière n’hésitent d’ailleurs
pas à nous solliciter et ils ont raison »
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L’Observatoire du métier de la scierie
et son club de scieurs
Entre artisanat et industrie, deux voies se profilent
Le Président a dressé d’après ses travaux
universitaires un état des lieux d’une profession comptant
2500 entreprises et employant quelque 17 000 salariés pour une
production de 10 millions de m3. Typologie, marchés, situation
européenne, pôles d’excellence, types de directions,
profil des scieurs et enfin vision stratégique pour chaque type
d’entreprise ont été traités. Problématiques,
pressions et enjeux ont été développés pour
tenter de mieux appréhender l’avenir. Selon le conférencier,
deux voies semblent se dessiner : celle de l’artisanat par la
revalorisation des produits, le conseil (qu’il faut faire payer
mieux), la vente directe, le service, la proximité et l’animation
du territoire, celle industrielle par la massification de l’offre,
la normalisation, la linéarisation (bois en barre), l’homogénéisation
et la vente en dépôt pour une reprise en main d’une
partie des ventes trop facilement laissées aux "marchands
professionnels".
Le constat du "véritable décrochage " de la
scierie française qui apparaît en matière de production
par rapport à celle de ses principaux concurrents européens,
Suédois, Allemands, Finlandais, Autrichiens, interpelle ! Problème
récurrent ou au contraire opportunité à saisir
? En effet, l’émergence d’une concurrence à
moindre coût, la baisse du prix du sciage (un produit qui s’est
massifié) rendent les produits de seconde transformation de plus
en plus attractifs. Va-t-on assister à un redéploiement
massif de l’activité vers la valorisation et vers le négoce
? L’avenir nous le dira. En tout cas, a souligné Maurice
Chalayer « beaucoup regardent déjà vers l’aval
de la scierie en pensant produire moins mais en vendant mieux des produits
et des services rares, par exemple le conseil au client que des décennies
de "tout production" a galvaudé ».
Du point de vue socioprofessionnel, on constate une transformation radicale
du métier avec l’augmentation des compétences requises.
La compétence technique ne suffit plus. Aujourd’hui la
volonté de conserver une tradition familiale de convivialité,
de proximité, de contact est en but à la nécessité
d’innovation et d’adaptation au monde.
Des problématiques fortes émergent : maintien des scieries
dans le milieu rural, regroupement d’entreprises, formation du
personnel et recrutement, concurrence européenne et internationale,
démarche qualité. « C’est de la capacité
à répondre à ces questionnements que dépend
l’avenir de vos entreprises de scieries » a conclu Pierre
Lambert, l’animateur, en ajoutant « Vous êtes à
un tournant comme tous les autres secteurs de l’économie.
Ni plus, ni moins »
Les scieurs confrontés à la concurrence
et aux difficultés de recrutement
La lecture de la première enquête de l’Observatoire
a permis de mettre à jour les inquiétudes liées
à la concurrence et au manque de visibilité quant à
l’avenir de la charpente sur liste (normes, produits standards,
bois massif reconstitué). Le recrutement reste le souci majeur
et ce quelle que soit la région. Bien que la charge de travail
reste énorme pour des chefs d’entreprise devant agir sur
tous les fronts, ces hommes ont conscience que leurs affaires sont réactives
et capables de s’adapter malgré des outils de production
trop figés et surtout trop chers. Le fait aussi d’être
dans des régions en essor est porteur d’activité
mais aussi de désagrément présent ou futur au sujet
du bruit pour le voisinage. Venant corroborer les conclusions précédentes,
le panel enquêté semble lui aussi lorgner très largement
vers l’aval de la scierie puisque des projets de 2ème transformation
et de séchage semblent prêts à s’enclencher…
PERSPECTIVES D’AVENIR selon enquête scieurs
Observatoire métier de la scierie 2004
FAIBLESSES |
FORCES |
ATOUTS |
CONTRAINTES |
MENACES |
INQUIETUDES |
Situation géographique
Niveau technique
Productivité
Recrutement M.O |
Réactivité
Connaissances
Matériau bois
Adaptabilité
|
Méthode de travail
Savoir–faire
Culture de métier
Spécificité par l’essence ou type de revalorisation
Région en essor |
Charge lourde en temps de travail
Diversification (éparpillement)
Investissements lourds (outils de travail) |
Concurrence
Manque de visibilité
Sur la charpente liste (normes, standard, importation, bois massif
reconstitué…)
Normalisation |
Concurrence
Recrutement du personnel
Travail non récompensé à la hauteur de l’investissement
(temps-travail) |
PROJET : Groupement, investissements matériels,
2ème transformation (produit fini), séchage… |
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Des espaces de discussion
ouverts entre scieurs et partenaires
Divisés en huit ateliers, les participants ont réfléchi
sur les deux thèmes principaux : « Place des scieries sur
le territoire » et « Mutualisation des compétences
et des outils ».
|
|
Un atelier en plein débat entre
scieurs et leurs partenaires |
La mise en commun devant le groupe |
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1er atelier : Quel avenir pour les acteurs
et leur savoir-faire?
Participants : Odile Riquet, médecin du travail, François
Rennesson, scieur, Alain Dulac, traitement du bois, Michel Junet, scieur
et négociant, Jean Paul Giorgis et son épouse, scieur
mobile, Christophe Recorbet, exploitant forestier, Patrick Bourgeois,
professeur scierie, Michel Pompidou, intervenant affûtage
Il ressort que, face à l’avenir flou, il est difficile
de rester serein tous les jours. Il faudrait rechercher de nouveaux
marchés mais cette démarche s’avère difficile
lorsque l’on est un entrepreneur pressé et stressé
par la gestion quotidienne de son affaire. Le problème de la
transmission d’entreprises (fiscalité) en même temps
que les charges trop élevées a été soulevé
ainsi que la mise aux normes du matériel. Le pivot de la scierie
reste le facteur humain mais aussi le facteur économique. Pour
fidéliser les salariés et éviter le turnover, il
faudrait arriver à davantage les libérer pour qu’ils
se forment (classement, maintenance, sciage, affûtage). Le coût
élevé du travail est un handicap face à la concurrence
étrangère.
2ème atelier : Quel avenir pour la
ressource forestière ?
Participants : Christian Bellaton et son épouse, scieur, Etienne
Lescure et son épouse, scieur mobile, Claude Raffin, scieur,
Patrick Gallin, commis de coupe, Lionel Amin, formateur forestier, André
Souvignet, exploitant forestier.
Le poids de l’histoire pèse sur une forêt trop morcellée.
Les intérêts sont loin d’être communs entre
l’utilisateur de la ressource (le scieur) et le propriétaire.
Tous le déplorent car cela va à l’encontre d’une
logique de complémentarité et surtout d’efficacité.
On subit une concurrence des "produits de l’Est" et
on se demande ce que l’on fera du bois blanc résineux demain
! Faut-il relancer un autre bois que le Douglas avec, par exemple, l’acacia,
le frêne ? Promouvoir le matériau bois est de plus en plus
nécéssaire. Tous ne sont pas convaincus pour l’instant
de l’écocertification bien qu’ils ne rejettent pas
l’idée de la gestion durable de la ressource. Faut-il aller
vers des A.O.C (comme en Chartreuse ou dans le Jura suisse) qui labellisent
un produit régional pour mieux le vendre, par exemple, le douglas
du Beaujolais, l’épicéa de Savoie ou encore le chêne
de Tronçais ?
3ème atelier : Comment pérenniser
les entreprises dans le flou actuel ?
Participants : Régis Buisson, scieur, Claude Chatard, scieur,
Michel Dupuis, entrepreneur de travaux forestiers, Philippe Poncin et
son épouse , scieur, Bernard Lambert, professeur affûtage,
Jean Paul Galland, fournisseur matériel scierie, Henri Vignon,
exploitant forestier.
Il faut apporter de la valeur ajoutée au matériau en
allant plus loin dans le produit fini. Mais aussi l’image des
entreprises de scierie doit évoluer. Métier trop souvent
qualifié de « vieillot ». Il faut savoir s’ouvrir
sur le monde extérieur en rencontrant les clients sur place mais
aussi en faisant des expositions dans les salons économiques.
Si l’on veut pérenniser son entreprise, il faut sûrement
en premier lieu communiquer la passion du métier vis-à-vis
de ses propres enfants mais aussi auprès de ses partenaires.
Il doit y avoir une volonté de chacun et la nécessité
de valoriser les hommes qui font ce métier. Une transmission
se prépare par un travail de communication qui peut durer des
années.
4ème atelier : Quels impacts sur
les entreprises ont la certification, le futur marquage CE ?
Participants : François Buckenmeyer et son épouse, scieur,
Stéphane Bourcier, consultant forêt-bois, Gérard
Blondeau, fabricant d’H.L.L, Joseph Matray, sécheur, Stéphane
Garzend, scieur, Jérôme Vadot, scieur, Denis Besson, CRAM
Rhône Alpes
Les atouts : un audit qui permet de faire un point sur l’entreprise,
avoir un produit qualifié et identifié, ainsi qu’un
suivi commercial et des garde-fous dans les procédures de fabrication
et de commercialisation.
Les contraintes : un suivi administratif, une redevance à répercuter
sur le client ! La formation du personnel, une responsabilisation accrue
du personnel, sciage rigoureux en sur côte.
Les acteurs se plaignent de ne pas avoir assez d’informations
par les institutionnels sur le sujet du marquage CE.
La réponse au sujet du séchage pour les bois de structure
est encore floue. D’un côté la norme ne l’impose
pas alors que le D.T.U charpente l’exige !
5ème atelier : Peut-on envisager des
partenariats durables ?
Participants : Etienne Lescure et son épouse, scieur mobile,
Patrick Bourgeois, professeur scierie, Denis Besson, CRAM Rhône
Alpes, Christian Bellaton et son épouse, scieur, Henri Vignon,
exploitant forestier, François Rennesson, scieur
Peut-on envisager des partenariats durables ? La réponse est
affirmative. On ne peut plus travailler tout seul aujourd’hui.
Le partenariat est durable si l’on a la volonté de travailler
ensemble. C’est le rapport "gagnant gagnant" basé
sur la confiance, la transparence et le service. Les partenariats vont
de l’amont à l’aval entre fournisseurs, transformateurs
et utilisateurs mais aussi en transversal entre banquiers, institutionnels,
formateurs…
La relation transparente et durable n’est pas forcément
formalisée par un contrat écrit et étalé
au grand jour. Beaucoup de groupement d’affaires existent mais,
à part le chef d’entreprise et son partenaire, personne
ne le sait. Confidentialité commerciale oblige. De toute évidence
avec la concentration des grands négociants et la disparition
des petits négociants locaux, il faudra trouver des moyens pour
vendre autrement : regroupement de l’offre, embauche d’un
commercial partagé, relance du courtage !
6ème atelier : Peut-on prendre en
main collectivement la vente des sciages en structurant l’offre
et l’image ?
Participants : Michel Junet, scieur et négociant, François
Buckenmeyer et son épouse, scieur, Jérôme Vadot,
scieur, Patrick Gallin, commis de coupe, Michel Dupuis, entrepreneur
de travaux forestiers,, Jean Paul Galland, fournisseur matériel
scierie, André Souvignet, exploitant forestier
Là aussi, plus de partenariats implicites que de groupements
officiels. Cependant, le groupe convient que l’on gagnerait en
efficacité en se regroupant sur des projets collectifs comme,
par exemple, en installant un dépôt de sciages en périphérie
de ville. Il faut véhiculer une image de marque. Beaucoup d’expériences
de groupements se sont achevées par une entreprise qui récupère
le projet initial. Mais d’autres fonctionnent comme Jura supérieur
et Sélection Vosges pour ne citer qu’eux. En tout cas,
il y a nécessité à offrir une image positive du
produit et surtout collective.
7ème atelier : Comment mettre en adéquation
la 1ère et la 2ème transformation du bois ?
Participants : Philippe Poncin et son épouse, scieur, Stéphane
Garzend, scieur, Claude Raffin, scieur, Gérard Blondeau, fabricant
d’HLL, Stéphane Bourcier, consultant forêt-bois,
Christophe Recorbet, exploitant forestier, Joseph Matray, sécheur
Le scieur peut-il fournir le bois dont la 2ème transformation
a besoin ? La réponse est oui si l’on connaît l’utilisation
précise du bois mis en oeuvre. Cela éviterait souvent
d’avoir des produits inadaptés et donc rebutés.
Des problèmes de communication, de disponibilité existent
pour améliorer les rapports entre producteurs et utilisateurs.
Tout se joue sur le relationnel. Il faudrait absolument prendre le temps
d’aller régulièrement voir les clients. Mettre les
problèmes au grand jour. Le scieur doit connaître les soucis
du client et inversement. L’approvisionnement qualitatif et dimensionnel
est plus facile auprès des exploitants forestiers. Cela évite
de se disperser et de faire mieux son métier de scieur.
8ème atelier : Comment former et
recruter les compétences ?
Participants : Jean Paul Giorgis et son épouse, scieur mobile,
Michel Pompidou, intervenant affûtage, Odile Riquet, médecin
du travail, Bernard Lambert, professeur affûtage, Claude Chatard,
scieur, Régis Buisson, scieur, Lionel Amin, formateur forestier
Essayer de former des jeunes du pays plutôt que de débaucher
les compétences chez les confrères. Il est plus difficile
de trouver du personnel en zone urbaine. Les jeunes, qui quittent l’entreprise
après la formation, laissent un sentiment de frustration à
l’employeur ! Mais, il convient de se poser la question du "pourquoi
les jeunes ne restent pas" ? Salaire insuffisant, mauvaise reconnaissance
professionnelle, conditions de travail difficile ?
Il faut admettre qu’un jeune en sortie de formation n’est
pas opérationnel tout de suite. Il convient de lui laisser du
temps pour s’adapter en facilitant les contacts avec les autres
salariés. En résumé faciliter les relations humaines.
En formation, il convient de donner au jeune " le goût au
métier " en passant du temps avec lui et en le mettant sur
les machines de production dans des temps appropriés (en fin
d’une série, en décalant son temps de travail pour
l’avoir seul après la journée de travail... ) Un
maître d’apprentissage sert à cela !
Si le chef d’entreprise n’a pas le temps de s’occuper
du jeune qu’il délègue un tuteur parmi les salariés
qualifiés de l’entreprise.
La formation reste un problème majeur et il a été
souligné que les effectifs baissent d’année en année
et qu’il y a menace de fermeture sur certains centres de formation
préparant au métier de scieur et d’affûteur.
Comme l’a soulevé l’Observatoire du métier
de la scierie (auprès de la F.N.B et de l’Education Nationale)
au printemps dernier ne pas prendre en considération ce problème
est une démission de la profession ! On risque de le payer cher
dans quelques années. Il faut se battre pour conserver les centres
de formation et surtout y envoyer des jeunes. Le recrutement se fera
sur une campagne nationale et sur la mobilisation des 2500 scieurs français
et non pas sur des campagnes locales qui n’ont aucune portée
mais se révèlent très coûteuses additionnées
les unes aux autres. Il y a urgence à trouver des solutions car
la formation scierie est dans le rouge !
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CONCLUSION :
Changer l’image du métier
C’est à Régis Buisson, vice-président de
l’association représentant les scieurs, qu’est revenu
le mot de la fin. Après tous les échanges de la journée,
il a lancé « nous sommes des gens de conviction. Nous devons,
et c’est très clair avec tout ce qui a été
dit, communiquer sur le métier. En résumé, si nous
voulons nous faire connaître auprès de nouveaux clients
et surtout auprès des jeunes pour recruter des compétences,
il va falloir changer l’image du métier. C’est à
chacun de nous de faire un effort… » Il a été
souligné aussi que doit être banni du langage professionnel
le terme " scieur de tête ". En effet « comment
ceux qui reçoivent le message l’interprètent-t-ils
? Cette formulation les incite-elle à venir voir notre métier
ou au contraire à le fuir ?» a demandé Maurice Chalayer.
Jean-Paul Galland, représentant le collège partenaire
et avec sa verve habituelle, a conclu en disant que « les scieries
aujourd’hui sont bien équipées mais fautent dans
la partie commerciale »
Pour Régis Buisson,
scieur dans l’Isère, la priorité c’est changer
l’image du métier
Aide publique à l’investissement
pour les scieries artisanales ?
Robert Lamy, député UMP du Rhône, le 20 avril dernier
attirait l’attention du ministre de l’Agriculture sur les
difficultés qu’éprouvent les scieries artisanales
face à la restructuration des scieries au profit des grosses
unités. Sans parler des nouvelles normes qui supposent des investissements
très lourds, hors de portée des petites scieries, Monsieur
Lamy est venu répéter « qu’il n’est
pas question de voir disparaître l’activité artisanale
en milieu rural. Ce serait une négation pure et simple de la
politique d’aménagement du territoire que nous menons.
J’ai demandé à Hervé Gaymard quelles mesures
il envisage de prendre pour sauvegarder ce tissu professionnel indispensable
à la dynamique de la filière bois. On sait que les cours
du sciage n’évoluent pas, alors que vos coûts de
production ne cessent de grimper. J’ai demandé qu’une
aide publique à l’investissement soit étudiée
pour que des écarts irréversibles ne se creusent entre
secteur artisanal et secteur industriel »
Lancé par le Président de l’association, le député
Robert Lamy
dit son soutien aux scieurs et à leurs partenaires
qui animent le monde rural
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Hommage aux bûcherons victimes
de la tempête
A la suite de son premier congrès
national, l’Observatoire du métier
de la scierie, a procédé à l’inauguration
de la stèle mémorial des bûcherons
victimes des chablis de 1999, à Grandris en Haute Azergues.
Le rôle des bûcherons essentiel
La tempête qui toucha la France en décembre 1999 et qui
fit tomber 144 millions d’arbres dans l’hexagone est encore
dans toutes les mémoires. Pourtant, on connaît moins le
lourd tribut payé par les "gens de la forêt",
victimes des chablis. Si, comme l’estimait René Joennoz,
représentant la DRAF Rhône Alpes, « le décompte
exact du nombre de victimes est rendu difficile par la grande variété
de leur régime social »
On évoque une centaine de disparus dans l’exercice de leur
métier. « Le rôle des bûcherons professionnels
mobilisés en masse fut essentiel après la tempête
pour dégager d’abord les routes puis ensuite les parcelles
sens dessus dessous » comme le souligna Jean Rabuel, représentant
la chambre syndicale du peuplier de France. Des pertes humaines, trop
nombreuses, qui rappellent douloureusement la dangerosité des
métiers forestiers et la nécessité d’améliorer
les conditions de travail. Gilbert Levrat, bûcheron de l’Ain,
espère voir souffler « un esprit forestier nouveau, avec
une filière solidaire et une collaboration accrue avec les pouvoirs
publics afin de mieux gérer et valoriser la forêt »
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Une partie des 43 souscripteurs
qui ont financé la stèle |
La stèle en bois de séquoia |
Un mémorial en Haute Azergues
C’est donc au nom de ce « devoir de mémoire »
souligné par Michel Mercier, président du Conseil Général
du Rhône, devant un public nombreux essentiellement composé
de professionnels du bois et en hommage aux victimes et à leur
famille qu’a été érigée, à
Grandris en Haute Azergues, la stèle représentant le bûcheron
en contact physique avec un chablis. La stèle, en bois de séquoia,
inaugurée le samedi 28 août, a été réalisée
à la tronçonneuse par le sculpteur jurassien Adrien Meneau.
L’Observatoire du métier de la scierie, qui est à
l’origine du mémorial, a rappelé par l’intermédiaire
de son président fondateur, Maurice Chalayer « que cette
initiative permette de sortir de l’ombre du bois les travailleurs
de la forêt par reconnaissance à leur action sur notre
environnement ». Le président a souligné qu’un
quarante trois souscripteurs, professionnels de toute la filière
bois et des particuliers ont financé entièrement le mémorial.
« Une action privée de solidarité qui montre qu’il
est possible de se mobiliser sans attendre tout des autres et surtout
tout des pouvoirs publics et des organisations syndicales.... »
L’avenir, associé talent et savoir-faire des hommes
du bois
Pierre Mourand, au nom de la communauté de communes de Haute
Azergues, a mis en exergue le choix de l’implantation au cœur
d’un territoire très boisé, connu pour ses Douglas,
et aussi très touché par la tempête puisque sept
années de récoltes ont été abattues en une
nuit . Sans oublier, a-t-il dit, « ceux qui ont servi le métier
avec courage, l’avenir est de développer ici comme ailleurs
la richesse territoriale forêt avec le talent et le savoir-faire
des hommes du bois »
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De gauche à droite : le sculpteur Adrien Meneau, le bureau de
l’Observatoire du métier de la scierie,
Patricia et Maurice Chalayer et Hélène Dumont, un bûcheron
retraité, Gilbert Levrat
Témoignage DE M. Gilbert LEVRAT, bûcheron
retraité. Montréal La Cluse Ain
« Ici, en terre beaujolaise, un homme, Maurice Chalayer,
une équipe, femmes et hommes engagés dans l’Observatoire
du Métier de la Scierie, ont voulu :
- témoigner et perpétuer une reconnaissance aux victimes
- compatir à la douleur de toutes les familles et personnes touchées
par le drame humain que la tempête de cette fin de millénaire
a hélas occasionné.
Pour cette association, il fallait penser aux victimes et laisser un
signe visible et durable pour rendre hommage à ces professionnels
qui ont donné leur vie à la forêt.
Elle l’a fait !
Les gens de la forêt ne l’oublieront pas et, aujourd’hui,
ils lui expriment leur profonde gratitude.
Engageons-nous, nous aussi, à ne pas laisser l’oubli s’installer.
Ce mémorial rappelle le sacrifice des disparus, la douleur des
familles, le devoir de mémoire.
Mais, il nous interpelle aussi et nous engage à une réflexion
sur la survie des métiers de la forêt, la dangerosité
du métier, la rentabilité, les cadences de récolte,
les investissements lourds et rendements journaliers réduits
pour les chablis.
La filière forêt bois a-t-elle été assez
solidaire et équitable ?
Les pouvoirs publics ont-ils bien cerné l’importance du
rôle des bûcherons débardeurs pour la pérennité
de la forêt ?
En ont-ils mesuré les enjeux ?
L’homme d’aujourd’hui, toujours pressé, ne
devrait jamais oublier qu’il «doit rendre des comptes à
la nature ».
Le bois n’est pas une matière industrielle inerte, il est
un produit vivant, issu du milieu naturel.
En forêt, gérer le temps, sans gérer l’homme,
la spécificité de la forêt, du matériau bois,
de l’économie locale au plus près de la ressource
est une erreur qui hypothéquera les générations
qui vont nous succéder.
La forêt est un patrimoine que nous recevons, que nous acquérons,
que nous gérons. Mais nous ne devons pas ignorer qu'il nous impose
l’obligation de le transmettre valorisé.
Malgré les contraintes et les difficultés, les gens de
la forêt ont manifesté entre eux beaucoup de solidarité,
d’amitié, de convivialité et la perte d’un
collègue, d’un ami, a renforcé encore plus les liens
naturels d’entraide légendaire, la philosophie et la fidélité
aux choses simples de la vie et de la nature, la passion pour la forêt
et le bois.
Pour nos disparus, devant ce mémorial, je veux faire un vœu
et en appeler à la conscience collective :
sans opposer les idées, les engagements de chacun, les connaissances
du passé qui ont une valeur expérimentale inestimable,
nous devons pallier un manque, créer une dynamique, une complémentarité,
une animation pour un esprit forestier nouveau, un dialogue constructif
entre filière forêt bois et pouvoirs publics afin de considérer
les différentes expressions de la connaissance comme complémentaires
et de les associer dans l’intérêt général.
L’expérience et les informations recueillies par la logique
de l’homme de terrain et des autres partenaires doivent toutes
être prises en compte.
La synthèse des problèmes de chacun et l’analyse
des propositions d’amélioration de chacun définiront
une solution équitable pour tous.
La gestion raisonnée et durable de la forêt passe par tous
ces critères.
N’est-il pas urgent de donner les moyens humains, sociaux, financiers,
une formation adaptée aux vrais écologistes que sont les
récoltants forestiers et sylviculteurs : ces hommes et ces femmes
qui n’ont qu’une volonté : vivre décemment
de leur travail et de leurs compétences reconnues !
Je terminerai par cette citation de Charles Flahaut :
« la sollicitude qu’un peuple témoigne à ses
forêts marque le degré de sa culture intellectuelle et
de son éducation morale »
Je vous remercie… »
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Témoignage de René
JOENNOZ, Chef du Service Régional de la Forêt et du Bois
Rhône Alpes
« En ces circonstances douloureuses, c’est
au nom de l’Etat et de l’administration du Ministère
de l’Agriculture, de la Pêche, de l’Alimentation,
et des Affaires Rurales (MAAPAR), en tant que membre de la DRAF, que
j’ai l’honneur de prendre la parole ce soir.
Nous sommes réunis pour l’inauguration de la stèle
mémorial dédiée aux bûcherons victimes de
chablis de décembre 1999. Le décompte des victimes est
délicat car les régimes sociaux de ces victimes n’étaient
pas les mêmes (entrepreneurs de travaux forestiers, salariés,
mais aussi propriétaires ou usagers des forêts non professionnels,
mais pourtant là pour sauver le maximum de ce qui peut être
sauvé)
Ces chablis sont arrivés à une époque où
les activités étaient ralenties, entre Noël et le
Nouvel an, la " trêve des confiseurs" disent les journalistes.
En dehors des zones fortement touchées, comme ici dans le Haut
Beaujolais, le pays n’a pas immédiatement pris la mesure
de l’ampleur des évènements. Il a fallu quelques
jours pour se rendre compte que c’était la « tempête
du siècle », même si les historiens ont montré
depuis que des phénomènes atmosphériques de cette
ampleur n’ont pas été exceptionnels au cours des
cinq derniers siècles.
La mesure du désastre prise, il a fallu réagir vite. Et
ce sont les bûcherons qui ont été les premiers sur
place pour ouvrir les routes, dégager les lignes électriques
et téléphoniques, apporter du réconfort aux populations
isolées et traumatisées. Ils ont été là
pendant plus de deux ans à récolter tout ce qui pouvait
l’être. Ils ont été aidés bien sûr
par les autres professions de la forêt (scieurs, transporteurs,
propriétaires…). Le travail était dur, dangereux,
mais rémunérateur.
Et puis est arrivée la fin des chablis et le prix du travail
a baissé, ce travail a parfois manqué. Ce sont les dures
lois du marché. Et les cours du bois ont toujours eu des hauts
et des bas, c’est la tradition. Et maintenant c’est reparti
! La leçon à tirer de ces épreuves, c’est
qu’il faut avancer dans le domaine des conditions de travail en
forêt. La mécanisation des travaux forestiers va dans ce
sens. L’avenir de la profession en dépend.
Je remercie l’Observatoire du Métier de la Scierie et le
Club des scieurs développeurs et de leurs partenaires pour avoir
pris l’initiative d’ériger un tel monument aux victimes
du travail, monuments trop rarement établis près des grands
chantiers, lesquels ont souvent fait des victimes. Je remercie tout
particulièrement M.Maurice Chalayer qui s’est dévoué
sans compter pour que le projet aboutisse. Je pense aussi à M.Gilbert
Levrat, du département de l’Ain, qui a pensé à
un tel mémorial dans son département, sans pouvoir le
réaliser matériellement.
Pour terminer, ayons une pensée toute particulière envers
ceux pour lesquels nous sommes réunis aujourd’hui, et qui
sont encore avec nous par l’esprit : les victimes de l’exploitation
des chablis.
ALTABOIS
Pour décompresser du congrès, quelque dix équipes
de professionnels du bois (scieurs, exploitants, fabricants, commerciaux)
se retrouvées dimanche matin au départ de l’Altabois
à Poule-les-Echarmeaux en Haute Azergues.
En tout, ce sont trente personnes qui se sont confrontées en
VTT sur un parcours de 45 km avec à chaque relais des épreuves
liées aux métiers du bois : découpe au passe-partout,
déplacement de billes, empilage de charge de voliges, portage
d’une pièce de charpente, montage d’une ferme traditionnelle
et enfin un questionnaire lié à la filière bois.
C’est l’équipe MFLS, entreprise d’affûtage
venue en force avec pas moins de trois équipes, qui a remporté
le trophée en bois réalisé à la tronçonneuse
sur le village d’arrivée, par Adrien Meneau, sculpteur
jurassien. L’objectif de montrer les produits bois a été
atteint puisque le stand de l’association du Club des scieurs
développeurs a été visité toute la journée
par un public nombreux et heureux de "toucher du bois "
L’équipe MFLS, dans l’exercice de remontage chronométré
d’une ferme traditionnelle